Taxe de protection et droits limités :
Antécédents historiques
Dès l’époque romaine des Juifs habitaient sans doute déjà à Aquae Mattiacorum, l’ancienne Wiesbaden. Dès 1385 la présence d’un Juif nommé Kirsan est documentée. Plus tard seuls quelques Juifs ont vécu à Wiesbaden, contrairement à Mayence, Worms et Spire où de florissantes communautés juives existaient déjà dès l’époque romaine et tout au long du Moyen Age. En 1427 on rapporte qu’un juif Gebhardt possédait une maison près de l’actuel Michelsberg. En 1518, le Juif Jakob de Nuremberg est mentionné dans les archives car il devait payer une taxe de protection annuelle. En 1570, un Juif nommé Moïse vivait dans la Mühlgasse. À l’époque, elle était également connue sous le nom de “Judengasse” (« ruelle des Juifs »). Ce nom a ensuite été donné à la Metzgergasse, l’actuelle Wagemannstrasse, où se trouvait une “Judenschule” (« école des Juifs »). Il n’y a jamais eu de ghetto à Wiesbaden. Apparemment les quelques familles juives vivaient parmi les autres citoyens, mais avaient moins de droits. Ils n’étaient pas autorisés à posséder des terres, à appartenir à une corporation d’artisans ou à effectuer un service militaire. En 1638, le Juif Nathan reçut l’autorisation de s’installer à Wiesbaden pour un an. A cette époque on était encore bien loin de penser à construire une grande synagogue. Malgré le petit nombre de Juifs, les autorités de Wiesbaden reçurent des plaintes répétées au sujet des voisins juifs.
La synagogue en 1869 : Un symbole d’émancipation
Un peu de Jérusalem au cœur de Wiesbaden, voilà ce que devait être la nouvelle synagogue de Michelsberg. La communauté juive choisit nul autre que Philipp Hoffmann (1806–1889) l’architecte de la cour de Nassau pour la construire. Hoffmann avait déjà dessiné / l’église catholique romaine de Saint-Boniface sur la Luisenplatz (1849) ainsi que l’église russe sur les hauteurs Neroberg (1855). Que maintenant il construise aussi la synagogue est l’expression de la tolérance religieuse et de la mentalité / libérale qui prévalaient généralement au milieu du XIXème siècle. Conséquences du Siècle des Lumières et de la Révolution française qui a proclamé les droits de l’homme et du citoyen.
Philippe Hoffmann a conçu la synagogue selon le plan centré d’un bâtiment byzantin. Ce faisant il faisait allusion aux racines communes du judaïsme et du christianisme. D’une certaine façon l’ordre dans lequel les lieux de cultes furent construits au milieu du 19ème siècle à Wiesbaden inscrit / dans la pierre la parabole de l’anneau de Lessing. Toutes les religions devaient jouir des mêmes droits. En 1864 l’église anglicane de la Kleine Wilhelmstraße avait été achevée. Les relations quotidiennes avec les clients russes, anglais ou américains des stations thermales a forcément conduit au cosmopolitisme de Wiesbaden.
Avec l’achèvement de la synagogue, toute personne regardant en direction de Michelsberg pouvait le voir : les Juifs étaient désormais reconnus comme des citoyens à part entière de la ville. La grande tour à bulbe était réellement d’une majestueuse féerie, avec ses étoiles dorées sur fond azur, quant à l’étoile de David sur le dôme, elle était visible de loin. La synagogue était devenue un nouveau symbole de Wiesbaden.
Dans l’ancienne synagogue, construite en 1826 dans la rue Schwalbacher, des malfaçons / ont rapidement été constatées. Le rabbin Benjamin Hochstädter a été l’un des premiers à plaider en faveur d’un nouveau bâtiment mais la communauté juive ne l’a pas suivi. En raison / de nouvelles arrivées de Juifs, l’endroit finit par être trop exigu. La communauté est passée de 200 membres en 1833 à 550 membres en 1863. Dès 1857, elle disposait de suffisamment de fonds pour financer un nouveau bâtiment. Les fonctionnaires de la maison de Nassau se sont montrés réticents et ont retardé l’approbation du permis de construire. Le duc Adolphe serait alors intervenu et aurait approuvé la « requête » de construire sur le terrain de Michelsberg. En 1862 Philipp Hoffmann se mit a travail. Un an plus tard il présenta les premiers plans, à la suite de quoi le permis de construire fut accordé.
Avec la construction de sa synagogue de Dresde (1840), Gottfried Semper (1803 — 1879) a ouvert la voie au développement d’une culture de la construction juive en Allemagne.
Semper l’ a construite dans le style dit mauresque, avec des arcs en plein cintre comme éléments structurants. Mauresque était synonyme d’oriental, le Dôme du Rocher était une représentation de Jérusalem. Le rocher sur lequel il se dresse aurait été, selon la tradition, le lieu du sacrifice dans le temple juif. L’ancêtre Abraham y aurait immolé un bélier à la place de son fils Isaac. Il est évident que Philipp Hoffmann a construit sur Michelsberg ce que la bourgoisie éduquée allemande s’imaginait être un temple de Salomon. Alors que pour la construction de l’église russe Hoffmann avait fait des recherches à St Petersburg et en Italie, il se rendit cette fois-ci à Bad Cannstatt pour s’inspirer d’une villa que l’ architecte Ludwig Zanth avait construite pour le roi Guillaume Ier de Wurtemberg.
Il a également étudié la nouvelle synagogue de Cologne (1861), œuvre de l’architecte Ernst Friedrich. Elle aussi avait été construite dans le style mauresque en vogue. Le funérarium du cimetière juif de la rue Platter (1891) a également été construit dans ce style.
Pour la synagogue précédente, située dans la rue Schwalbacher, l’administration du duché de Nassau avait exigé que le bâtiment ne soit pas remarqué. « Le chant des Juifs dérange alors moins les passants que si la synagogue se trouve dans le même alignement des bâtiments », a écrit l’inspecteur des bâtiments Karl Friedrich Faber, qui avait planifié le bâtiment. Avec cette remarque, il a probablement reflété l’esprit de son temps. En 1826 , la synagogue est déménagée de la Oberen Webergasse à la rue Schwalbacher. A cette occasion une procession solennelle devait porter les rouleaux de la Torah dans la nouvelle synagogue. Le ministère de l’état rejeta brutalement ce souhait. « Les Juifs n’ont aucun droit de célébrer un rite en public, car ils ne jouissent pas des droits d’une église. Ils ne sont tolérés que dans le silence.»
Inauguration avec l’ensemble vocal de la synagogue :
Visite royale au Kurhaus
A la fin des années 1860 les choses avaient changé. Le 13 août 1869 dans l’après-midi un important cortège d’environ 500 membres de la communauté a sollennellement marché de la rue Schwalbacher à Michelsberg, portant les rouleaux de la Torah, au son des chants de louange. Les jeunes de l’école étaient en tête. Ils étaient suivis par ceux qui portaient les rouleaux de la Torah et par des jeunes filles vêtues de blanc, portant la clé de la synagogue. Parmi les participants se trouvaient le maître d’œuvre Philipp Hoffmann, accompagné du conseil de la communauté et du rabbin Dr Samuel Süßkind qui le dirigeait, d’ ecclésiastiques de différentes confessions, comme l’évêque protestant Wilhelm Wilhelmi, ainsi que des représentants des autorités civiles et militaires. La nouvelle synagogue comptait 500 places. Le jour de l’inauguration elle ne put cependant pas accueillir tout le monde. Une foule immense de spectateurs s’était massée le long de la rue Schwalbacher et aux alentours de Michelsberg.
« Ce fut », raconte un témoin oculaire, « un moment solennel quand, accompagnés par le son de l’orgue, les membres les plus âgés de la communauté ont marché dans le magnifique nouveau temple portant les rouleaux de la Torah venant de l’ancienne synagogue, quand le rabbin Süsskind les a placés dans l’arche sainte et, récitant la bénédiction, a allumé la lampe éternelle. ». Le journaliste du Rheinischer Kurier rapporta que l’orgue et les chants ont retenti au moment où la procession fit son entrée dans la synagogue, suivis par le cantique « qu’elles sont belles, tes tentes, ô Jacob ! ».
La veille de l’inauguration, même le roi Guillaume de Prusse, qui deviendra l’empereur allemand Guillaume Ier, s’est rendu à (l’ancien) Kurhaus écouter un concert de l’ensemble vocal de la synagogue, rendant ainsi hommage à la communauté juive. L’inauguration de la nouvelle synagogue fut précédée par un office religieux dans l’ancienne synagogue.
Le XIXe siècle : Le long chemin vers l’émancipation
La mise sur un pied d’égalité civique des Juifs avec les autres citoyens a progessivement commencé dans le duché de Nassau, le nouvel état de la Confédération du Rhin, lorsqu’ en 1806, sous l’influence de Naopléon, le « Leibzoll », un péage coproporel spécial que les Juifs devaient payer lors de leurs déplacements, fut supprimé. En 1817 Nassau fut le premier état de la confédération allemande à créer des écoles ouvertes aux élèves de toutes confessions et, en 1819, à rendre l’école obligatoire pour les enfants juifs. En 1841 la taxe de protection imposée aux Juifs fut supprimée. A partir de 1842 les Juifs de Nassau ont reçu des noms de famille. Le pas suivant fut l’introduction en 1846 du service militaire obligatoire. Une impulsion supplémentaire vers l’égalité des droits fut donnée par l’esprit libéral de la révolution de 1848/49, à la suite de laquelle des lois supplémentaires visant à l’égalité des droits pour les Juifs furent promulguées dans l’état de Nassau. Pourtant dans le même temps, des pogroms contre les Juifs étaient organisés dans les zones rurales. En 1852 le duché fut divisé en 83 districts synagogaux. Et désormais, en 1869, l’émancipation des Juifs s’incarne dans le paysage urbain de Wiesbaden — visible pour tous.
Le dôme central se dressait à 35 mètres de hauteur. Un bâtiment représentatif dans un emplacement particulièrement visible. Quelques années auparavant, les protestants de Wiesbaden se demandaient encore s’il fallait construire un bâtiment à Michelsberg pour remplacer l’église de Saint Maurice, qui avait brûlé en 1850. Ils ont finalement choisi l’emplacement de l’actuelle église de Marktkirche (1862). Le nom Michelsberg fait référence à la chapelle de Saint Michel, qui se trouvait dans le cimetière de cet endroit.
La nouvelle synagogue était une amélioration urbanistique et apportait de nouvelles et passionnantes perspectives visuelles. La grande tour à bulbe de la synagogue dialoguait avec les tours de l’église protestante de Marktkirche ainsi qu’avec celles de l’église catholique de Saint-Boniface. La synagogue avec ses quatre petits dômes à bulbe faisait également référence à l’église russe sur les hauteurs de Neroberg.
L’aménagement intérieur s’accordait au magnifique design extérieur. Le dôme de la synagogue à trois nefs était décoré d’étoiles dorées sur fond bleu. Les quatre piliers du dôme, les demi-colonnes et les arcs de ceinture brillaient par leur somptueuse décoration. Les murs habillés de bleu, gris, vert et rouge créaient une atmosphère sacrée. La lumière qui pénètrait par le dôme central donnait à la pièce de la majesté. Les petites tours du dôme permettaient aux femmes d’accéder aux galeries supérieures, au rabbin d’atteindre son bureau et à l’organiste d’arriver à l’orgue. Mais les femmes étaient également autorisées à s’asseoir en bas avec les hommes. La chaire devant l’abside était en marbre de Nassau. En face se trouvait le chandelier à sept branches. Derrière, sous un dais richement décoré, se trouvait le Saint des Saints, l’arche sainte contenant les rouleaux de la Torah. Ses colonnes de marbre portaient un toit doré. Une lumière colorée tombait à travers une fenêtre ronde et baignait l’espace sacré.
Le dais présentait des similitudes avec celui de la synagogue de la rue Oranienburger à Berlin, inaugurée en 1858. Philipp Hoffmann avait magistralement résolu le problème consistant à créer un bâtiment imposant sur un terrain relativement petit. L’étoile de David ne brillait pas seulement au-dessus du dôme principal, son motif traversait tout le bâtiment, son plan et ses façades.
Avec la Constitution de l’Empire de 1871, les Juifs allemands sont devenus des citoyens à part entière dans l’empire alors nouvellement créé. La sécurité juridique et une bonne dose de liberté leur ont permis de s’élever socialement dans la bourgeoisie. A Wiesbaden de nombreux Juifs étaient des médecins ou des avocats respectés. Salomon Herxheimer (1842 — 1899), par exemple, était un spécialiste des maladies de la peau. Son frère Karl Herxheimer (1861 — 1942) fut directeur de la clinique de dermatologie de la ville. Médecin-conseil et décoré de la Croix de fer au ruban blanc, Benjamin Wolff (1845 — 1892), membre de la « Alt-Israelitischen Kultusgemeinde » (communauté juive à tendance orthodoxe), fut le premier conseiller municipal juif de Wiesbaden. Plus tard, dans les années 1920, le chef d’orchestre Otto Klemperer, le compositeur Ernst Krenek, le directeur musical Otto Rosenstock ainsi que le chanteur d’opéra Alexander Kipnis ont travaillé au théâtre lyrique de Wiesbaden. Sous la direction de Paul Bekker, grâce aussi à de nombreux autres artistes juifs qui ont vécu, au moins temporairement, à Wiesbaden, la scène musicale de la ville thermale jouit d’une excellente réputation internationale.
Otto Klemperer, originaire de Wroclaw, a été l’un des plus importants chefs d’orchestre du XXe siècle. De 1924 à 1927 il fut le directeur musical de Wiesbaden, sous l’intendance de Carl Hagemann. Paul Bekker a été directeur général du théâtre de Wiesbaden de 1927 à 1932 et il a inclus un certain nombre d’œuvres contemporaines dans son répertoire. C’est à lui que Wiesbaden doit la renaissance en 1928 du festival du mois de mai, l’ancien festival de l’empereur allemand. Bien que les artistes n’aient pas appartenu au coeur de la communauté juive, ils ont contribué à la notoriété des juifs de Wiesbaden.
Parmi les personnalités juives de la ville figurait le rédacteur en chef du Wiesbadener Tagblatt, Hermann Lekisch, qui parallélement écrivait des pièces de théâtre. Ce journaliste à l’esprit libéral fut licencié en 1933.
Avec sa soeur Emmy, il fut déporté à Sobibor en juin 1942 et assassiné dans une chambre à gaz. Depuis octobre 2010, un “Stolperstein” (« pierre d’achoppement ») devant la maison de la presse, au 21 de la Langgasse, honore la mémoire de Hermann Lekisch.
Fiche de la Gestapo de Hermann Lekisch. Dernière mention cynique : 10.06.42 : évacué vers l’Est.
(Illustration: Communauté juive de Wiesbaden. StadtA WI NL 210 Nr. 1)
Le judaïsme libéral
C’est également le judaïsme libéral bourgeois qui a marqué l’esprit de la communauté juive. Abraham Geiger (1810 — 1874) y a joué un rôle décisif. Bien qu’il n’ait pas suivi la construction de la synagogue en tant que rabbin, celle-ci ayant été construite après son départ de Wiesbaden, ses idées et ses impulsions ont exercé un effet durable sur la communauté.
À la suite de Moïse Mendelssohn (1729 — 1786), Geiger a tenté de concilier les nouvelles découvertes de la science et de la technologie avec la religion, la raison et la foi, tout comme l’ont tenté les théologiens protestants Friedrich Schleiermacher (1768 — 1834) et Albrecht Ritschl (1822 — 1889). Pendant son séjour à Wiesbaden, Abraham Geiger a publié le “Zeitschrift für jüdische Theologie” (« journal de la théologie juive »). Le duc refusant de le nommer rabbin de l’état, et ne voyant aucune perspective à Wiesbaden, il se rend en 1838 à Wroclaw, puis à Francfort sur le Main et finalement à Berlin, où il enseigne à la « Hochschule für Wissenschaft des Judentums » (« académie pour l’étude du judaïsme ») à partir de 1872.
C’est donc le rabbin Dr Samuel Süßkind, qui exerça son office à Wiesbaden de 1844 à 1884, qui inaugura la nouvelle synagogue de Michelsberg. Le fondement intellectuel qui a précédé la construction de la synagogue, démarche considérée come progressiste pour les normes de l’époque, a été construit par des érudits des religions comme Abraham Geiger. Finalement Geiger n’a pas manqué l’occasion d’assister à l’inauguration de la synagogue de Wiesbaden.
Au 19ème siècle l’antisémitisme était beaucoup moins prononcé dans la « ville thermale et touristique » de Wiesbaden que dans certaines autres petites villes. Cependant au début du XXe siècle, l’arrivée de Juifs russes, majoritairement pauvres et orthodoxes, dont la plupart se sont installés dans le Westend, des tensions sont apparues parmi les Juifs de Wiesbaden. Des conflits surgirent entre riches et pauvres, entre “Juifs de l’Est” et citoyens établis, dont certains ne voulaient pas fréquenter les nouveaux arrivants sans le sou, des tensions surgirent également entre orthodoxes et libéraux. En 1925, environ trois pour cent de la population de Wiesbaden était juive, dont un tiers environ était originaire d’ Europe de l’Est. Après les pogroms qui ont eu lieu en Russie entre 1903 et 1906 et qui firent plus de 2 000 victimes, de nombreux Juifs de l’Est sont arrivés en Europe occidentale.
Les tensions étaient également dues à l’apparence extérieure des Juifs de l’Est, qui allait à l’encontre des efforts d’intégration des Juifs allemands de l’époque précédent la Première Guerre mondiale.
Les boutiques juives appartenaient naturellement au paysage urbain de Wiesbaden au début du XXe siècle. Dans le Westend, par exemple, Ephraïm Tiefenbrunner possédait un magasin au 3 de la rue Herrmann. Il vendait de la charcuterie cacher, qu’il faisait venir d’une boucherie berlinoise par un service de nuit express. Son concurrent était Isaak Altmann au 33 de rue Helenen. Entre 1905 et 1928, de nombreux Juifs d’Europe centrale et orientale arrivèrent également à Wiesbaden, en particulier de la Galicie polonaise, qui a fait partie de l’Autriche-Hongrie jusqu’en 1919. Beaucoup de ceux qui vivaient dans le Westend entre les rue Schwalbacher, Scharnhor, Emser, Bertram et Goeben avaient des liens de parenté. Ils parlaient yiddish, une langue similaire au moyen haut allemand, avec des éléments slaves et hébreux et une écriture hébraïque. Bien qu’ils soient officiellement membres de la communauté juive de Michelsberg ils avaient leurs propres oratoires appelés “Stibl” en yiddish. Environ 25 familles se considéraient comme de pieux Hassidim particulièrement pieux.
Une des entreprises les plus prospères de Wiesbaden était dirigée par le fabricant juif Dr Leopold Katzenstein. Ce médecin né en Thuringe dirigeait à Erbenheim (arrondissement de Wiesbaden) la « Pharmazeutische Industrie Dr. Katzenstein » (« Industrie Pharmaceutique Dr Katzenstein »). Leur produit appelé « Kinder-Risinetten » (« Risinettes pour enfants ») était efficace contre les pharyngites, les laryngites et les bronchites. Leopold Katzenstein fut assassiné dans le camp de concentration de Sachsenhausen, sa femme Dorothea à Auschwitz.
Le Wiesbaden juif était un univers multiforme et l’éventail de ses citoyens allaient du discret employé pauvre et sans emploi jusqu’au bourgeois de la classe supérieure la plus en vue.
Judaïsme libéral et judaïsme orthodoxe : la séparation
Rapprocher la liturgie juive de celle chrétienne avec « l’orgue synagogal » de Michelsberg, était pour pour les membres les plus pieux trop libéral et trop assimilationniste. Du point de vue des « pieux », les « liberaux » s’étaient trop éloignés de leurs ancêtres. Les orthodoxes désapprouvaient tout à la fois l’installation de l’ogue et la création en 1863 de l’ensemble vocal de la synagogue, auquel les femmes aussi pouvaient participer et insistaient sur la nécessité de clairement se démarquer d’un environnement / imprégné par le christianisme. Le fait que les libéraux ne respectaient plus les règles du chabbat suscita la désapprobation. En 1878, une quarantaine de familles a quitté la communauté juive et a fondé la « Alt-Israelitischen Kultusgemeinde » (communauté juive à tendance orthodoxe). Elle fut l’une des premières communautés de Prusse à faire sécession et à construire sa propre synagogue, inaugurée en 1897 dans la rue Friedrich. Là de nouveau l’office religieux était célébré selon la tradition et dans le respect des lois.
Pendant un demi-siècle, de 1876 à 1925, le rabbin Dr Leo Kahn (1888 — 1951) a marqué la vie religieuse des Juifs orthodoxes.
« la première chose dont j’ai besoin est un mikveh » aurait dit à son arrivée à Wiesbaden le rabbin Dr Kahn, qui était originaire de Sulzburg, dans le Bade-Wurtemberg.
Il n’y avait en effet plus de bain rituel dans la synagogue de Michelsberg. Les Juifs orthodoxes ont alors redonné vie à l’ancien mikveh du 9 de la ruelle Spiegel. Ce bâtiment abrite aujourd’hui le théâtre Pariser Hof ainsi que le Aktive Museum Spiegelgasse für deutsch-jüdische Geschichte (musée actif de la ruelle Spiegel pour l’histoire allemande et juive). Le successeur du rabbin Dr Kahn, le Dr Jonas Ansbacher (1879 — 1967), originaire de Nuremberg, rapporte que le rabbin Dr Kahn “a protégé sa congrégation comme un aigle protège son nid”, qu’il était d’une profonde piété, d’une grande érudition et d’une admirable éloquence. Dr Ansbacher fut de 1925 à fin 1938 le rabbin de la communauté orthodoxe. Il a été interné pendant quelques temps / dans le camp de concentration de Buchenwald d’où il réussit à s’évader en 1939 et fuir en Angleterre. De 1941 à 1955 il a été rabbin d’une synagogue à Londres.
Paul Lazarus (1888 — 1951), le rabbin de la communauté juive libérale, l’a attesté : « l’intrépide combattant du début de son mandat était devenu le symbole d’une coexistence pacifique entre les deux communautés ». Le rabbin Dr Kahn est mort à l’âge biblique de 94 ans, immensément respecté à la fois par les juifs et les chrétiens. Sur sa pierre tombale deux mains bénissantes rappellent qu’il appartient à la lignée des prêtres juifs.
Paul Lazarus était un homme de dialogue : entre orthodoxes et libéraux, entre juifs riches et pauves. Il s’est particulièrement engagé en faveur de l’intégration des Juifs de l’Est et pour l’action caritative. Lorsque la dictature nationale-socialiste interdisit aux enfants juifs de fréquenter les écoles publiques, il veilla à la création de l’école de la rue Mainzer, qui a ouvert ses portes en 1936.
Le rabbin des Juifs orthodoxes :
Dr Eliezer Leo Lipman Kahn
(Illustration : Miriam Kraisel, petite fille du rabbin Dr Kahn)
Rabbin Dr Kahn avec sa famille
(Illustration : Miriam Kraisel, petite-fille du Rabbin Dr Kahn)
Le successeur du rabbin Kahn :
Dr Jonas Ansbacher
(Illustration : Aktives Museum Spiegelgasse)
Visiteurs du monde entier : les cimetières juifs
Le premier cimetière juif a été établi en 1750 sur le Kuhberg dans la rue Idsteiner, aujourd’hui Schöne Aussicht. Jusqu’alors, les Juifs de Wiesbaden étaient enterrés à Wehen. À partir de 1750, le terrain de Kuhberg a également servi de cimetière aux communautés juives environnantes. En 1883, parmi d’autres, Ephraim Ben Abraham Schönberger, y a été enterré. Sur sa pierre tombale, on peut lire : « C’était un homme respecté et craignant Dieu de tout son cœur ». Au moins aussi respecté devait être Marcus Berlé, conseiller commercial privé du Duc, qui est passé de vitrier à fondateur d’une banque prospère, et qui était un grand bienfaiteur de la synagogue de Michelsberg.En 1890 le cimetière de Kuhberg fut fermé. Mais aujourd’hui encore, des personnes d’Israël, des États-Unis et du monde entier viennent se recueillir ici sur les tombes de leurs ancêtres.
Après sa création, la communauté orthodoxe a établi en 1877 son propre cimetière sur le chemin de Hellkund. En raison de la fermeture du cimetière de “Schöne Aussicht”, la communauté juive a ouvert en 1891 un cimetière dans la rue Platter, tous deux à proximité immédiate du Cimetière Chrétien du Nord. L’actrice du théâtre de Wiesbaden Luise Wolff (décédée en 1917) et le fondateur du grand magasin Julius Bacharach (décédé en 1922) sont, entres autres, enterrés au cimetière du chemin de Hellkund. La communauté juive actuelle enterre ses morts dans le cimetière de la rue Platter. Il existe également des cimetières juifs dans les arrondissements de Bierstadt, Schierstein et Biebrich ainsi qu’à Walluf. Mais ils ne sont plus utilisés.
Entre intégration et incitation à la haine : le judaïsme de l’entre-deux-guerres
La période de l’entre-deux-guerres, sous la République de Weimar, est ambiguë pour les Juifs de Wiesbaden. D’une part la défaite allemande de 1918 et les difficultés économiques qui ont suivi ont provoqué un nouvel antisémitisme plus exacerbé. D’autre part il était question de créer un centre communautaire moderne juif sur l’actuelle Platz der deutschen Einheit (place de l’unification allemande) et d’avancer sur la voie de l’intégration.
Le déclin économique, les dispositions perçues comme extrêmement injustes du traité de paix de Versailles (1919), et l’humiliation infligée par les forces d’occupation françaises ont favorisé à Wiesbaden aussi un climat anti-juif. Une fois de plus, les Juifs et les Juives ont servi de boucs émissaires. Ce sont surtout les mouvements d’extrême droite qui ont présenté les Juifs comme les responsable de la défaite du Reich allemand lors de la Première Guerre mondiale et qui ont encouragé la haine contre eux, tout comme contre les “criminels de novembre”. Il s’agissait des « partis de Weimar », le SPD ( Sozialdemokratische Partei Deutschlands (SPD) ou Parti social-démocrate d’Allemagne abrégé en SPD), le USPD (Unabhängige Sozialdemokratische Partei Deutschlands (USPD) ou Le Parti social-démocrate indépendant d’Allemagne,abrégé en USPD), le DDP (Deutsche Demokratische Partei (DDP) ou Le Parti démocrate allemand, abrégé en DDP) ainsi que le Centre catholique. Exemple du patriotisme juif allemand, Walter Rathenau (DDP), ministre de la Reconstruction du Reich, réussit avec « l’accord de Wiesbaden » en 1921 à obtenir un allégement des réparations de guerre dues à la France. Rathenau sera assassiné en 1922 à Berlin par des extrémistes de droite.
La crise économique des années 1920 a également eu des répercussions sur les Juifs de Wiesbaden, jusqu’alors prospères. En 1922 la communauté organise / « cuisine populaire » pour ses membres les plus démunis. Par la suite, en 1924, sera construite une « maison de retraite israélite » au 24 de la rue Geisberg. Un « centre d’aide sociale » inspiré par la mission caritative catholique existait déjà depuis 1917. Une association de colonies de vacances juives permettait aux enfants démunis de faire des séjours à la campagne.
La funeste nuit de novembre 1938 : une tragédie en cinq actes
La tragédie du 10 novembre 1938, au cours de laquelle les(Sturmabteilung — section d’assaut, abrégé en SA) et les trouppes du parti ont détruit la synagogue de Michelsberg peut rétrospectivement être découpée en cinq actes.
Acte I : le soir du 9 novembre, Joseph Goebbels, ministre de la Propagande du Reich, prend comme prétexte l’attaque à Paris le 7 novembre du diplomate Ernst vom Rath par le juif Herschel Grünspan pour ordonner aux organisations politiques de conduire une réaction « spontanée ». Pendant la nuit, des hommes du NSDAP (Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei, Le Parti national-socialiste des travailleurs allemands, abrégé en en NSDAP) et des SA en civil ont pénétré dans la synagogue de Wiesbaden. Ils ont jeté les rouleaux de la Torah en l’air, déchiré les livres de prières, volé tout ce qui leur semblait avoir de la valeur et mis le feu à la synagogue.
Acte II : vers 4 heures du matin les pompiers sont arrivés. N’ayant probablement pas pris la pleine mesure des événements, ils ont commencé à éteindre l’incendie.
Acte III : vers 6 heures apparaît à nouveau un commando nazi, toujours en civil, pour feindre la spontanéité. En réalité les ordres venaient de Berlin. La synagogue a de nouveau été incendiée, avec des produits accélérateurs de feu. Cette fois-ci les pompiers avaient reçu des instructions claires du Parti : protégez uniquement les bâtiments voisins. La police a regardé et laissé faire. C’est ainsi que George Buch (1903 — 1995), le futur maire SPD de Wiesbaden, a décrit les événements de la nuit.
Acte IV : vers 8 heures, une foule s’était massée à Michelsberg. Certains étaient armés de haches et de pieds-de-biche. Ils ont cassé les bancs en deux et les ont empilés pour former une pyramide. Apparemment, la synagogue ne brûlait pas assez vite pour eux. Ils ont aspergé la pyramide de bois d’essence et y ont mis le feu. Désormais le bâtiment était entièrement en flammes. Personne n’a protesté, du moins pas publiquement. Selon les témoins, un silence gêné regnait parmi les passants médusés.
Acte V : Dans l’après-midi vers 14 heures le dôme s’est effondré.
En proie aux flammes : la synagogue le 10 novembre 1938 à midi
(Illustration : HHStAW Best. 3008,1,1, 3997)
Dans un zèle aveugle la foule se déchaîne dans les magasins
Pendant que la synagogue brûlait, les boutiques juives du centre ville étaient ravagées. Parmi tant d’autres, le magasin de chapeaux Ullmann, le caviste Simon, la bijouterie Heimerdinger, le magasin de vêtements pour enfants Baum dans la ruelle Weber, la parfumerie Albersheim ainsi que le magasin de chaussures Mesch. L’entreprise Salberg — verre et cristaux – au début de la ruelle Lang a également été attaquée. Quelques maisons plus loin, les casseurs ont lancé dans un zèle aveugle dans la rue des chaussures depuis un magasin.
Les déprédations se sont toutes déroulées selon le même schéma : les troupes de casseurs brisaient les fenêtres et les portes, saccageaient les magasins et jetaient la marchandise dans la rue. « Les Allemands n’achètent pas dans les magasins juifs », était écrit sur les panneaux de carton que les escouades de SA accrochaient aux devantures. Dans leur zèle aveugle, ils ont brisé les vitrines des magasins juifs. La police ne s’est pas montrée.
L’appartement et le bureau de l’avocat Berthold Guthmann ont également été vandalisés. « Les gens ont jeté les dossiers par la fenêtre, détruit les meubles et brisé les vitres », mentionne l’ acte d’accusation déposé auprès du tribunal régional de Wiesbaden en 1950. Guthmann a été arrêté et déporté au camp de concentration de Buchenwald, où il a été détenu pendant six semaines et durement maltraité. Après sa libération, il est retourné à Wiesbaden. Il y a pris la présidence de la « Einheitsgemeinde » juive (communauté unitaire orthodoxe) et a aidé de nombreux membres de la communauté à émigrer. Lui-même resta jusqu’à son transfert forcé à Francfort en novembre 1942, d’où il fut finalement déporté et assassiné à Auschwitz en 1944. Il avait déjà perdu sa licence d’avocat en 1933. Pendant la Première Guerre mondiale, Berthold Guthmann avait été lieutenant dans l’aviation et avait reçu la Croix de fer. Guthmann n’a saisi aucune des occasions de se mettre à l’abri à l’étranger, lui et sa famille. En tant que membre du conseil d’administration de la communauté juive et représentant de la « Reichsvereinigung des Juden in Deutschland » (« Association des Juifs du Reich en Allemagne »), il est resté au service de sa communauté, et a soutenu ses membres de son mieux, jusqu’à la dernière grande déportation de 1942. Guthmann a été contraint de collaborer à la dissolution de la communauté et de la « Reichsvereinigung des Juden in Deutschland ». Il a également été contraint d’établir les listes pour les déportations.
L’empereur Guillaume II en personne avait été client de la célèbre boutique de mode pour dames de Carl Bacharach (1869 — 1938), située au 2 – 4 de la ruelle Weber. L’homme d’affaires et sa femme Anna furent arrêtés en mars 1939.
Carl Bacharach est mort dans le centre de détention de la rue Albrecht. La maison de Bacharach au 6 – 8 de la rue Alexandra était l’une des 42 « Judenhäuser » (« maisons juives ») dans lesquelles la population juive de Wiesbaden fut isolée de force dès le début de la guerre.En 1943 les dernières maisons juives furent dissoutes.
Pendant des mois, les ruines de la synagogue de Michelsberg ont témoigné de l’ ignominie. Ce n’est qu’à l’été 1939 que les ruines furent déblayées. Finalement, en 1950 les fondations de la synagogue furent arrachées et la rue Coulin élargie. Désormais plus rien ne rappelait l’ancien emplacement de la synagogue.
Des décombres dans les arrondissements de Wiesbaden : cinq synagogues profanées
Les 9 et 10 novembre 1938, cinq synagogues ont été profanées et détruites à Wiesbaden par des escadrons de destruction nationaux-socialistes : deux au centre-ville (celle de Michelsberg et celle de la rue Friedrich) ainsi que les synagogues de Bierstadt (construite en 1827), Schierstein (1858) et Biebrich (1860). On renonça à incendier la synagogue de la rue Friedrich, probablement parce que les flammes risquaient de se propager aux bâtiments voisins. Bien que les nationaux-socialistes se soient également déchaînés dans la petite maison de prière au 6 de la rue Blücher, où se réunissaient les Juifs orthodoxes orientaux du quartier, aucun incendie n’y fut allumé, probablement en raison de l’exiguïté du bâtiment. La synagogue de Biebrich, également saccagée en 1938, a été victime d’un bombardement pendant la guerre. Les ruines de la synagogue de Bierstadt ont été rasées en 1971.
Ordonné par Berlin : un crime d’État organisé
Pour le ministre de la Propagande du Reich, Joseph Goebbels, l’assassinat d’Ernst vom Rath à Paris était l’occasion rêvée d’annoncer une nouvelle étape dans la persécution des Juifs allemands. Sans même mentionner l’incendie des synagogues, le Nassauer Volksblatt, journal paraissant à Wiesbaden, affirmait au lendemain des terribles événements : « quiconque marchait dans les rues pouvait entendre la profonde exaspération / du peuple face à cet acte vil et infâme des Juifs ». Et plus loin : « si à certains endroits des dommages ont été causés, les Juifs ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes ». Le journal Tagblatt s’est exprimé dans des termes similaires. Lui aussi a évité de mentionner les destructions et s’alarme du fait que les « dommages » sont « un avertissement qui ne peut être exprimé plus clairement ».
En 1946, les principaux auteurs de cette nuit de pogroms à Wiesbaden ont été jugés, mais n’ont été condamnés qu’à des peines légères. Bien que la loi prévoie une peine d’ au moins dix ans d’emprisonnement pour les incendies criminels, des peines de seulement deux à cinq ans ont été prononcées.
Bien avant les pogroms de novembre, deux Juifs de Wiesbaden avaient déjà été assassinés par les nationaux-socialistes : en avril 1933, au 46 de la ruelle Weber, ils tuèrent Max Kassel, âgé de 39 ans, marchand de lait et trésorier du SPD. Au 20 de la rue Wilhelm ils s’en prennent au marchand Salomon Rosenstrauch, âgé de 58 ans. Alors que suite à l’agression Rosenstrauch succombait à une crise cardiaque, Kassel fut abattu d’un coup de pistolet. Les agresseurs furent certes poursuivis mais punis avec grande clémence.
Au printemps de 1938, les Juifs de Wiesbaden ont dû déclarer tous leurs biens et, en octobre, 300 Juifs polonais ont été explusés en Pologne. Presque tous ont été victimes de l’ Holocauste.
De l’incendie criminel à la déportation massive : le début de la machinerie génocidaire
Le 20 janvier 1942, s’est tenue à Berlin la « Conférence de Wannsee » pour mettre au point la « solution finale de la question juive ». Les Juifs allemands, privés de leurs droits depuis les lois de Nuremberg de 1935, devaient être déportés vers l’Europe de l’Est et y être tués. Déjà en octobre 1938 des Juifs de Wiesbaden ont été appréhendés lors d’une première vague d’arrestations. Le 17 octobre, le rabbin Paul Lazarus a tenu son dernier sermon dans la synagogue de Michelsberg. Il a déclaré avec prémonition : « Cette époque nous a appris à nous dire au revoir ». Après les pogroms de Novembre, le rabbin Lazarus fut déporté dans un camp de concentration. Il s’enfuit en 1939 à Nice et de là émigre en Palestine. Appauvri, il meurt en Israël en 1951. Après les destructions de la « Nuit de Cristal », la communauté juive fut autorisée pendant un certain temps à tenir ses services dans la synagogue de la rue Friedrich. En 1999, la bibliothèque de 1 700 ouvrages de Paul Lazarus a été donnée au « Förderkreis Aktives Museum deutsch-jüdischer Geschichte » ( « Amicale du Musée Actif pour l’histoire juive et allemande ») à Wiesbaden par ses filles Eva et Hanna.
Les déportations massives de Wiesbaden commencèrent le 9 juin 1942, après quoi un peu moins de 600 Juifs vécurent encore dans la ville. En 1933, il y en avait environ 2 800.
Un départ volontaire n’était plus possible depuis le 1er octobre 1942. La dernière grande déportation eut lieu le 1er septembre 1942. A dessein, c’est précisément un samedi, jour de chabbat, le 29 août, qu’environ 370 Juifs de Wiesbaden ont dû se rassembler dans la cour de la synagogue partiellement détruite de la rue Friedrich. Ils n’avaient le droit d’emporter qu’une petite valise et un maximum de 50 Reichsmark. Le reste de leurs biens avait été confisqué. Ils ont passé des nuits de désarroi et de désespoir dans la synagogue. On leur avait annoncé une « Gemeinschaftsunterbringung außerhalb des Altreichs » (« hébergement communautaire en dehors du territoire de l’ancien Reich »). Mais Hitler n’avait-il pas dès 1939 parlé de l’ « extermination de la race juive en Europe » ?
Partant de la rue Friedrich, les Juifs et les Juives, pour la plupart âgés, devaient marcher jusqu’à l’abattoir, où ils étaient massés sur la rampe de chargement du bétail, puis entassés dans les wagons de la Reichsbahn qui les attendaient. Ils ont été envoyés comme du bétail à la mort. Via Francfort-sur-le-Main jusqu’à Theresienstadt et de là jusqu’aux grandes usines de mort de l’Est. Ils ont même dû payer pour ce voyage vers la mort. Bien peu d’habitants de Wiesbaden se sont souciés des persécutés. Près de 100 Juifs de Wiesbaden ont évité la déportation en se suicidant.
Retranscription de la lettre d’adieu
Dimanche 2.11.40
Ma chère famille Recteur! *
Avec ces quelques lignes, ma femme et moi prenons congé de vous — pour toujours ! Je vous écris ces lignes car en cette dernière heure il reste encore diverses choses à terminer dans les délais, en pleine conscience et avec le consentement de ma femme.
Hier 1er novembre, un ami prêtre d’Ettlingen, s’enquérant de son état, dit à mon fils que tous les non-Aryens de la région auraient à quitter leur domicile dans les prochaines heures pour être expulsés.
Nous sommes persuadés que tôt ou tard, le même sort nous attend. Pour nous autres, personnes âgées et usées, un bannissement aussi épouvantable équivaut à la mort. C’est pourquoi nous préférons une fin rapide. Nous vous remercions du fond du cœur pour tout l’amour et toutes les attentions que vous nous avez eus à notre égard durant le temps de notre voisinage. Puisse la Providence être toujours présente à vos côtés.
Par l’ esprit, je vous serre de tout cœur à tous la main.
August Spiegel et Ida Spiegel
* Nikolaus Prediger était recteur dans des écoles à Wiesbaden.
Un rocher porte leurs noms : les combattants oubliés
Même leur participation à la Première Guerre mondiale (1914 — 1918) n’a pas sauvé les Juifs allemands des chambres à gaz. Au total 57 soldats juifs de Wiesbaden — dont beaucoup avaient reçu la Croix de fer — ont pendant cette guerre laissé leur vie dans les tranchées du front occidental et oriental. Par rapport aux 2 000 Juifs que comptait Wiesbaden vers 1914, ce nombre de morts était démésurément supérieur au nombre de victimes dans la population de la ville. Une plaque commémorative sur un bloc rocheux dans le cimetière juif de la rue Platter rappelle les soldats tombés à la guerre.
Le 22 mai 1921 la plaque commémorative fut solennellement dévoilée par le rabbin Paul Lazarus. Il s’était lui aussi engagé comme volontaire de guerre et aumônier militaire en 1916 et a servi en Macédoine. Lorsqu’en août 1914 les cloches des églises de Wiesbaden ont retenti, les Juifs de Wiesbaden aussi ont prié dans les synagogues pour la victoire de leur patrie. Fin 1932, la « Wiesbadener Ortsgruppe des Reichsbundes Jüdischer Frontsoldaten (« La section de Wiesbaden de la Fédération des soldats juifs de première ligne du Reich ») comptait 105 membres. Après la prise de pouvoir d’ Hitler, ils ont été ménagés pendant un certain temps, mais à partir de 1936, on ne leur a plus accordé le moindre égard. Toute activité politique leur fut interdite et en 1938 la féderation des soldats juifs est dissoute.
Sur la plaque commémorative du cimetière juif on peut lire entre autres noms : Karl Hamburger (1891 — 1915), Sigmund Helfer (1877 — 1917) et Theodor Abraham (1880 — 1918). Le fait que pendant la Première Guerre mondiale les Juifs de Wiesbaden étaient, tout autant que bien d’autres, prêts à sacrifier leur vie pour leur patrie n’est guère présent dans la mémoire collective. À part la plaque commémorative dans le cimetière juif, rien dans le paysage urbain de Wiesbaden ne rappelle leur sort.
Pas de quartier pour les juristes juifs
Emouvants et poignants sont aussi les destins des juristes juifs. Dr Rolf Faber, juriste et chercheur à Wiesbaden, a rédigé l’histoire de ces destins et les a fait paraître dans la revue des archives de la ville. Wiesbaden comptait plusieurs douzaines de juges, procureurs et avocats juifs pendant la République de Weimar. Le Dr Wilhelm Dreyer (1882 — 1938), qui est évoqué ici comme exemple était juge à la cour d’appel de Francfort-sur-le-Main. En 1933 il fut relegué au tribunal régional de Wiesbaden et en 1935 mis d’office à la retraite. Le 10 novembre 1938, ne se doutant de rien, il se rend à la convocation de la police au quartier général de la rue Friedrich. Il y est arrêté, et avec d’autres Juifs de Wiesbaden, déporté au camp de concentration de Buchenwald. Dr Dreyer est mort le 25 novembre, deux semaines seulement après son incarcération. Il était l’un des 26 000 hommes juifs arrêtés dans le Reich sur ordre de Reinhard Heydrich, chef de la « Sicherheitspolizei » ( « police de sûreté » ).
Wilhelm Dreyer n’était pas le seul habitant de Wiesbaden dont la famille s’était convertie au protestantisme à la fin du XIXe siècle. Lui aussi a été soldat pendant la Première Guerre mondiale, avec le grade de lieutenant. Mais ni sa foi protestante ni sa participation à la guerre ne l’ont protégé de la mort. Son seul et unique « crime » était d’appartenir à la « race juive ».
La privation des droits des Juifs après la « Machtergreifung » ( « prise de pouvoir » ) par les nationaux-socialistes s’est déroulée en plusieurs étapes : dès avril 1933 la « Gesetz zur Wiederherstellung des Berufsbeamtentums » (« loi sur la restauration de la fonction publique » ) crée la base légale pour écarter de la fonction publique les les fonctionnaires juifs ou politiquement indésirables. Après la promulgation en 1935 des Lois de Nuremberg, aucun Juif n’était plus autorisé à occuper une fonction publique, son statut de citoyen lui était quasiment retiré. La jurisprudence et la séparation des pouvoirs avaient pour ainsi dire été abolies en Allemagne depuis qu’en 1933 Hitler s’était autoproclamé détenteur du pouvoir judiciaire allemand.
L’humiliation et l’exclusion atteignent un nouvel échelon : à partir de septembre 1941 tous les Juifs du Reich et des territoires occupés doivent porter la « Judenstern » ( « l’étoile jaune »). L’étoile de David, qui depuis 1869 était visible de loin sur le dôme de la synagogue de Wiesbaden, était devenue un moyen de stigmatisation. Ses porteurs étaient sans droits ni dignité.
Après la Libération de 1945 : l’étoile de David brille de nouveau dans la ville
Pendant la période du national-socialisme, un crime d’une dimension à peine concevable a été commis contre les Juifs européens. Seuls quelques uns y ont survécu.
Dès 1945, la communauté juive de Wiesbaden a commencé à se reconstituer sous la protection des Américains. En 1946, grâce à ses propres efforts, elle put inaugurer à nouveau la synagogue de la rue Friedrich.
A l’origine de la réédification de la communauté se trouvait Claire Guthmann, la veuve de l’avocat Berthold Guthmann, qui avait été assassiné à Auschwitz. Elle et sa fille Charlotte sont les seuls membres de la famille à avoir survécu au camp de concentration de Theresienstadt. Claire Guthmann était retournée en Allemagne en tant que « Displaced Person »
( « personne déplacée » ) et avait d’abord vécu dans un camp avant de se voir rapidement attribuer une chambre à Wiesbaden. Le 21 juillet 1945, le « Betreuungsstelle für politisch, rassisch und religiös Verfolgte » ( centre en charge des personnes persécutées pour motifs politiques, raciaux ou religieux » ) de Wiesbaden a informé l’administration militaire américaine de la refondation de la communauté juive. Claire Guthmann en a été la première porte-parole. Utilisant les locaux de l’ancienne maison de retraite juive du 24 de la rue Geisberg, elle s’est occupée de la prise en charge des membres. En 1946 le Dr Léon Frim, originaire de Lemberg, devient président de la communauté. Le Dr Frim avait survécu aux camps de concentration d’Auschwitz et de Buchenwald. Parmi les co-fondateurs des la communauté juive on trouve également Jakob Matzner.
Lors d’une cérémonie solennelle, le 22 décembre 1946, à Hanoucca, fête des lumières, la synagogue fut à nouveau inaugurée. Le colonel James R. Newman, l’homme qui avait proclamé Wiesbaden capitale du nouvel État de Hesse en 1945, s’est exprimé au nom de l’administration militaire américaine. La ville était représentée par le maire Hans Redlhammer (CDU). Le rabbin militaire américain William Dalin a allumé les bougies du chandelier de Hanoucca. Le seul parchemin de Torah sauvé lors de la profanation de novembre 1938 est revenu ce jour-là de son « exil » suisse à Wiesbaden. En la personne de Chaim Hecht, la communauté avait à nouveau son propre rabbin.
Une reconstruction de l’ancienne synagogue ou la construction d’une nouvelle à Michelsberg a d’abord été envisagée, mais ensuite abandonnée.
Dans les années 1960, la synagogue de la rue Friedrich ne répondait plus aux besoins de la communauté, qui décida d’en construire une nouvelle. En 1965, la première pierre a été posée et en 1966, la synagogue a été inaugurée. Le grand rabbin de l’état de Hesse Dr Isaak Emil Lichtigfeld était présent lors de son inauguration. Le ministre-président Georg August Zinn (SPD) s’est exprimé au nom du Land de Hesse, et le maire Georg Buch (SPD) a félicité l’assemblée au nom de la ville de Wiesbaden. Buch avait lui-même été autrefois prisonnier dans les camps de concentration de Hinzert et de Sachsenhausen.
Le bâtiment moderne conçu par les architectes Helmut Joos et Ignaz Jakoby est caractérisé par les fenêtres du sculpteur et verrier de Wiesbaden Egon Altdorf. Les tons bleu, rouge rubis et jaune doré dominent. Seul le Buisson ardent brille en vert. Les couleurs changent au cours de la journée en fonction de la lumière. Les tons violets qui apparaissent au crépuscule disparaissent le lendemain.
Pour en savoir plus sur l’histoire d’après-guerre de la communauté juive de Wiesbaden, consultez l’exposition en ligne: Le Wiesbaden Juif : entre nouveau commencement, la confiance et « Tarbut — Zeit für jüdische Kultur ».
Communauté juive en mouvement : l’immigration en provenance de l’ex-Union soviétique
u début des années 1990, le nombre de membres de la communauté a augmenté de façon spectaculaire grâce l’arrivée des émigrants de l’ex-Union soviétique. Un dynamisme nouveau s’est emparé de la vie communautaire. Jadis relativement âgée, la communauté se réjouit désormais de la présence de nombreux enfants. L’intégration des russophones donna beaucoup de travail à la communauté, mais l’engagement de Wiesbaden est considéré comme exemplaire en Allemagne, notamment grâce au soutien de la « Zentralwohlfahrtsstelle der Juden in Deutschland » ( « Office Centrale d’Aide Sociale aux Juifs d’Allemagne » ) basée à Francfort. Tirant un parallèle entre l’arrivée des nouveaux « Juifs de l’Est » et les querelles de 1920 entre Juifs allemands et de l’Est, Dr Jacob Gutmark dit : « cette fois-ci nous ne devons pas échouer, ou alors il n’y aura bientôt plus de communautés juives ».
En 2023, la communauté juive de Wiesbaden compte près de 850 membres. Cela en fait une des communautés de Hesse qui connaît la croissance la plus rapide, après Kassel et Offenbach. Mais il n’y a pratiquement plus de Juifs allemands. La majorité sont des immigrés. Nombre d’entre eux ont été détenus dans des camps de concentration dans plusieurs pays.
Transmettre des savoirs et des valeurs juives à ceux qui ont grandi dans un état athée a depuis lors été l’une des tâches les plus nobles de la communauté. Aujourd’hui, les deux tiers de ses membres proviennent de pays de l’ex-Union soviétique.
Une assistante sociale et une assistante d’intégration s’occupent non seulement d’eux, mais aussi des plus de deux mille personnes de leurs familles, qui ne sont pas membres de la communauté juive.
Leur patrie se situe entre le golfe de Finlande et la mer Noire, et ils l’ont quittée pour l’Allemagne. Beaucoup sont médecins, artistes, ingénieurs. Certains ne parlaient pas un mot d’allemand quand ils sont arrivés, d’autres seulement quelques bribes de yiddish.
Mais pourquoi émigrent-ils précisément en Allemagne ? Cette question est souvent posée au Dr Jacob Gutmark. Sa réponse : « Depuis la fin de la guerre, on sait que l’on n’est plus persécuté en Allemagne et que l’on peut y réussir ». En Russie, en revanche, dit-il, la situation des Juifs est aujourd’hui encore assez difficile.
Cercle d’apprentissage et club culturel : une vie communautaire animée
Une animation intense règne dans le centre communautaire de la rue Friedrich. On approfondit ses connaissances religieuses, on apprend l’allemand et l’hébreu, souvent en tandem. Au « TuS Makkabi Wiesbaden », le club de sport Maccabi de Wiesbaden, on fait de la gymnastique, on apprend des techniques d’auto-défense, on joue aux échecs, au ping-pong, et au basket-ball. Un enseignement religieux reconnu par l’État est dispensé dès la première année du primaire et jusqu’au baccalauréat. Pour les cours on vient au centre communautaire, on se réunit au sein du cercle Tom Salus ou dans la salle du club culturel. Il y a aussi une association de natation pour seniors ainsi qu’un « espace de rencontre » pour les survivants de l’Holocauste. Plus d’une centaine de bénévoles sont activement impliqués dans la vie de la communauté. Anita Lippert, née Fried en 1931, est le dernier membre de la communauté de Wiesbaden à avoir fréquenté l’école juive de la rue Mainzer. Plus tard, partant de la rampe de l’abattoir, elle fut déportée à Theresienstadt.
Le journal de la communauté est publié régulièrement — en allemand et en partie en russe — avec des contributions très variées. L’un des rites les plus importants est l’office du chabbat, du septième jour de la semaine, jour du repos divin après la création du monde. Le service est suivi d’un repas festif pris en commun. Toutes les autres fêtes juives sont également célébrées ici.
La synagogue de Wiesbaden est également visitée par des communautés chrétiennes venues s’informer, et en particulier par des groupes scolaires. Il y a plus de 80 groupes de visiteurs par an. La communauté juive se considère comme une communauté unifiée et successeur juridique et moral de la communauté d’avant-guerre. Elle célèbre ses offices selon le rite orthodoxe. Les “libéraux” peuvent également y participer. A l’inverse cependant, les orthodoxes ne participeraient jamais à un service libéral.
Les anciens Juifs de Wiesbaden et leurs descendants vivent aujourd’hui dispersés sur tous les continents. Depuis les années 1970, ils sont régulièrement invités par Wiesbaden, capitale de la Hesse. Le Aktive Museum Spiegelgasse für deutsch-jüdische Geschichte (AMS, musée actif de la ruelle Spiegel pour l’histoire allemande et juive) entretient également des contacts étroits avec de nombreux Juifs de Wiesbaden et leurs familles vivant à l’étranger, notamment pour écrire leurs biographies mais surtout pour rédiger l’histoire de ceux qui furent jadis assassinés.
Longtemps, pendant plus d’un quart de siècle, le cantor Avigdor Zuker a marqué la vie de la communauté. Il a également enseigné à la « Hochschule für Jüdische Studien » ( « Faculté des Etudes Juives » ) de Heidelberg. Dans les années 2000, Avraham Zeev Nussbaum était cantor. Après une formation complémentaire en 2004 à Jérusalem, il fut cantor et rabbin de la communauté. Depuis le début des années 1980, le Dr Jacob Gutmark, né en 1938, est un des quatre membres du conseil d’administration. Il donne un visage à la communauté dans la ville et lui apporte un poids. Dr Gutmark s’occupe des affaires internes, de la culture et de la religion mais aussi de représenter les intérêts de la communauté. Depuis 2007, un contrat existe entre la capitale de l’État et la communauté juive.
Concert dans le cadre de la série d’événements « Tarbut – un temps pour la culture juive » dans la salle du forum de la culture.
(Illustration: Communauté juive de Wiesbaden. Photographe: Igor Eisenschtat)
La synagogue de Wiesbaden
(Illustration: Communauté juive de Wiesbaden. Photographe: Igor Eisenschtat)
Aujourd’hui, la communauté est présente de nombreuses façons dans la vie de la ville. Depuis 2008, elle organise la série d’événements « Tarbut — Zeit für jüdische Kultur », « Tarbut — un temps pour la culture juive » dont l’offre riche va d’un concert donné par un orchestre d’instruments à vent joués par de jeunes israéliens de Kfar Saba, ville jumelée de Wesbaden, à des films israéliens projetés au cinéma Caligari, des soirées littéraires à la Villa Clementine, et jusqu’à des expositions aux thèmes variés à l’hôtel de ville.
En 2020, la ville a décerné à la communauté juive le prix de la culture de Wiesbaden, pour sa série de manifestations.
En 2013 fut rétablie la « Jüdisches Lehrhaus », « Maison d’Etudes Juives », qui organise des événements abordant les divers aspects de la culture et de l’identité juive, transmet le savoir juif et s’intéresse à des thèmes historiques.
Les statuts de la communauté juive stipulent que les enfants et les jeunes doivent recevoir une éducation religieuse et culturelle et être élévés dans « l’amour du peuple juif ».
Depuis 2006, Steve Landau est le directeur exécutif de la communauté. Il assume également la direction de la « Maison de l’Enseignement Juif ».